jeudi 1 mars 2012

Bangkok' paradoxes !



Les surprises de Noël à Bali n’étaient en fait que le prologue du grand voyage de ce début d’année, un mois et des poussières en Thaïlande, avec pour finir une semaine dans le nord de Sumatra, l’idée étant de voyager le plus possible en stop, avec un hébergement fait de camping sauvage ou de Couchsurfing, site d'hospitalité on line !

J’ai donc debarqué à Bangkok un 28 décembre au soir, sans vraiment savoir où aller ni dormir, ce qui m’a decidée à aller à un meeting Couchsurfing, vaste reunion de voyageurs aux profils variés dont certains habitent à Bangkok, d’où l’intérêt ! Par chance, j’ai rencontré Toom, un Thaïlandais doctor honoris causa en accueil de l'étranger, qui a transformé sa maison en auberge espagnole pour la bonne cause… De la place pour une étudiante française, bientôt rejointe par une deuxième ? Toujours ! Au final, j'ai eu droit à un lit pour plus d’une semaine, attendant un ami pour partir vadrouiller dans les hauteurs du pays thaïlandais… ce qui n’était pas de trop pour découvrir les paradoxes de Bangkok, et accessoirement bosser pour la fac et Sciences Po !

Dès mon premier soir à Bangkok, en sortant de l’aéroport sac au dos, j'ai eu l’impression de redevenir petite fille, découvrant Paris… cette fois perdue dans la capitale thaïlandaise, ébahie dans le metro par tous ces gratte-ciels étincellants, ces Thaïlandais chics et trendy, habillés court, beaucoup plus court qu’en Indonésie !Première rencontre mémorable avec cette ville tentaculaire de 7,7 millions d’habitants, où s’attirent les contraires : palais vs tours géantes, marchés traditionnels vs centres commerciaux immenses, moines bouddhistes vs ladyboys et jeunes Thaïlandais delurés !

Le Bouddha géant du temple de Wat Pho 


Broderies de Birmanie
Esprit dans son jardin

Par rapport à l’Indonésie, Bangkok m’a semblé beaucoup plus occidentalisé, un peu comme Jakarta, mais une version beaucoup plus agréable à vivre ! Plutôt que de s’arrêter a Khao San, ghetto des “backpackers” qui fait écho aux pièges à touristes de Bali, il faut découvrir Bangkok depuis sa périphérie, beaucoup moins visitée et socialement plus intéressante, jusqu'au centre historique, où se concentrent les monuments historiques, superbes.


      Les guides de voyages formatés, une conséquence du tourisme à grande échelle...                                                                                                   
Besoin de faux papiers ?

Le centre de la ville moderne se situe à Siam Square, une station de métro entourée par des malls qui s’enchaînent les uns aux autres, affichant un étalage de luxe, de profusion et de gaspillage assez déroutant, quand on pense au niveau de vie des campagnes et aux images des inondations de novembre.





Bangkok du côté de Siam Square


Le shopping apparaît comme le passe-temps favori des Thaïlandais (des Sud-Asiatiques en général, en Indonésie aussi...), au vu du nombre de centres commerciaux qu’il y a au km² dans chaque quartier, même les moins favorisés. On y trouve tout, plaisirs de la bouche, cinémas, piscines, massages, banques, fringues… Une belle definition grandeur nature de la societé de consommation, qui transforme les malls en lieux de vie artificiels.


Mall by night





La “modernité” de Bangkok, ce sont aussi les grandes artères bondées aux heures de pointe, les taxis qui défilent -sans s’arrêter, communication difficile entre les chauffeurs qui ne parlent pas anglais et nous pas thaïlandais !, le cinéma américain côtoyant les têtes d'affiche thaïlandaises, le style dandy/girly dans le métro, et les ladyboys, institution dans le pays. Il fait également bon d’être gay en Thaïlande, particulièrement à Bangkok, et ce climat de tolérance change de l’Indonésie, où la culture musulmane est particulièrement intransigeante vis-à-vis de l'homesexualité ou du transgenre. Néanmoins, cet aspect positif de la societé thaïlandaise a aussi son revers, car cette réputation favorise le tourisme sexuel, développé au point de devenir une véritable industrie dans le pays.


Ville de la démesure, des extrêmes, Bangkok est aussi la ville des révolutions puisque c’est dans la capitale qu'ont eu lieu les derniers troubles du printemps 2010 opposant les “chemises rouges”, qui soutiennent l'ex-premier ministre Thaksin, aux forces des “chemises jaunes”, pro-gouvernementales. Ici se dessine une fracture dans la société thaïlandaise entre classes populaires, rurales et élite urbaine, que le consensus autour du bouddhisme et de la royauté ne parvient plus à résorber.

Pour autant, l’institution monarchique reste inébranlable : on peut voir un peu partout dans les rues des portraits géants du roi et de la reine, et l’effigie royale n 'est jamais bien loin : sur les pièces de monnaie, les drapeaux jaunes, les calendriers, les bijoux,… Les Thaïlandais aiment leur roi et ils le proclament haut et fort ! D’ailleurs, dire le contraire est passible de prison, le crime de lèse-majesté étant pris très au serieux par la justice thaïlandaise, qui peut condamner jusqu'à quinze ans de prison pour diffamation sur la personne royale.

Le Grand Palais...
... et ses miniatures en peinture !

Les Goliaths du palais !






Cette ferveur dure depuis longtemps, car Rama IX, connu sous le nom de Bhumebol Adulyadej, règne en Thaïlande depuis soixante ans. Mon ami Toom n’a connu que lui depuis sa naissance et le vénère, ayant presque les larmes aux yeux quand j'ai eu le malheur d'évoquer le grand âge de sa majesté, 84 ans, et sa succession prochaine. Il faut croire que la monarchie est bien enseignée à l’école et dans la societé, ou pour être plus franche, que l’embrigadement des esprits est ici monnaie courante. 


Quelques exemples pour illustrer mes propos : 
 
Nous sommes en train de nous promener dans un parc avec mon amie Maïna. Autour de nous, des gens s’agitent, courent ou font de la gymnastique. Soudain des hauts parleurs commencent à crachoter une musique étrange, et tout le monde s’arrête, au même moment, une scène digne d’un film de science-fiction. Nous ne comprenons rien, mais nous nous arrêtons aussi, prises au dépourvu ! Quand la musique s’achève -en fait l'hymne royal, chacun reprend son activité, l’air de rien. 

Le même jour, un peu plus tard, nous allons au cinéma. Bandes-annonces, pubs… rien de bien particulier, jusqu’à ce que tout à coup l’image du roi apparaisse à l’écran. Aussitôt, tous les spectateurs se lèvent d’un seul homme, et regardent sagement défiler les images du roi aidant les pauvres, rendant visite aux travailleurs, etc…


D’après mes amis thaïlandais, le roi a beaucoup fait pour son pays, ce qui explique la haute estime dont il bénéficie. Mais, malgré tout son dévouement, sa majesté reste quand même le dirigeant le plus riche du monde, avec une fortune s’élevant à 23 milliards d’euros. Une bonne resolution pour 2012 serait peut-être de partager un peu de ce pactole avec le peuple, et de réduire les inégalités entre villes et campagnes ?

Campagnes que nous sommes partis ensuite explorer pendant quelques semaines, loin du vacarme étourdissant de Bangkok, à lire dans un prochain article...



Version thaïlandaise du kaki lima indonésien
Crabes et autres crustacés du marché flottant, miam !

Dessert traditionnel, coco/oignon, c’est beau et bon !

Dignes de nos boîtes à sardines !

Un dernier Bouddha pour finir...

1 commentaire:

  1. Cher Tiphaine, c'est toujours avec beaucoup de plaisir que je lis tes articles tous très enrichissants. Continues de nous éblouir de magnifiques photos et de belles anecdotes qui nous font apercevoir une petite fenêtre de l’Indonésie. Bisous, tu me manques !!

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