lundi 24 octobre 2011

Contes et légendes du Bromo

Mon dernier voyage loin de Jogja était en direction de l’Est de Java, avec pour destination finale le Gunung Bromo –encore un volcan, ce n’est pas ici qu’il en manque ! Après onze heures de bus qui m’ont permis d’observer toute la diversité des paysages javanais –villages, rizières et embouteillages des grandes villes polluées comme Surabaya, capital politique de Java Est-, nous avons débarqué en pleine nuit dans un petit hameau perché sur les hauteurs, à quelques kilomètres seulement du volcan.
Le lendemain, le réveil fut très dépaysant ! Changement de cadre culturel en effet : nous étions dans un village de montagne hindouiste, avec ses traditionnelles guirlandes de petits drapeaux… Pas de réveil aux aurores ici par l’appel du muezzin, mais des chants mystérieux le soir aux abords des temples, et des offrandes dissimulées un peu partout pour nourrir les esprits : dans des mini-autels, aux coins des portes, jusque dans les toilettes !Un peu plus et on se croyait au Népal, avec face à nous le parc naturel du Bromo, lointaine ressemblance avec les monts de l'Himalaya…
Heureusement que les pubs pour Indomie, les nouilles instantanées indonésiennes, étaient là pour nous rappeler que l’on était bien en Indonésie… ! C’est là une des grandes richesses du pays, ce mélange la plupart du temps pacifique des cultures et des religions, entre les différentes îles ou à l’intérieur d une même province.
Après avoir attendu quelques heures pour échapper à une tempête de sable –plus précisément de cendres-, nous voilà partis –nous : 5 sur 8 de mes colocs, et un copain malais. En entrant dans la réserve, il faut d’abord passer devant un ensemble de guides et conducteurs de motos (ou de chevaux !), qui s’efforcent de nous expliquer à quel point l’ascension est fatiguante, et de nous vendre des masques anti-cendres… C’est presque devenu un ritual de refuser en souriant –et oui, la marche peut être un plaisir !
Nous traversons une grande mer de sable, on se croirait dans Tintin au pays de l’or noir, ou sur la lune –il manque seulement la sensation d’apesanteur. Bientôt, nous arrivons aux abords d’un temple hindouiste qui semble abandonné…


Au-milieu des guirlandes, charmante pub pour Indomie !

Route non pavée, mais le chemin est tracé !

Explorateurs de tous styles !

Le seul arbre rescapé

Au loin, le temple (non) abandonné 

Mais c’est une erreur ! Le Bromo est en effet un lieu sacré, très fréquenté par les hindo-boudhistes indonésiens et par toutes les personnes à la recherche de recueillement et de ressourcement spirituel. Des ceremonies sont même organisées chaque année sur la crête qui surplombe le cratère. La plus célèbre, la cérémonie dite du Kesada, commence par des prières au sommet et s’achève par des offrandes jetées dans le cratère, en souvenir d’un fils d’un roi lui-aussi offert au Bromo contre une promesse de prospérité et de fertilité pour sa famille et son peuple.
Nous suivons donc le parcours des fidèles, gravissant l’escalier qui nous amène auprès du cratère. C’est un veritable gouffre, large de 1000m et profound de 300m, très impressionnant avec son panache de fumée! Il faut savoir qu’entré dans les livres de mythologie, le Bromo n’en reste pas moins actif, et dangereux, son dernier réveil datant de 2004.
Le lendemain, réveil à trois heures pour voir le lever du soleil, et un superbe panorama sur le Bromo et ses voisins : le Segawari Kidul, le Segarawadi Lor, le Mont Kursi et le Batok. Beaucoup d’Indonésiens sont avec nous au point de vue, et nous expliquent que venir au Bromo est une sorte de pélerinage pour eux.

Même les dieux ont le droit de manger, cherchez l'offrande !




Ceci n'est pas un volcan !

Cratère fumant



Quatre heures du matin...










Plutôt que de repartir directement à Jogja, nous décidons de faire escale sur le chemin du retour dans un endroit secret d’où jaillissent des sources, au milieu des fougères. Ce ne sont pas les chutes du Niagara, mais c’est quand meme plus spectaculaire que le saut du Doubs ! Petit bonus, on réussit à se faufiler sous les cascades et à se baigner dans des bassins d’eau claire. Bien-sûr, hors de questions pour moi de me baigner dévêtue : T-Shirt et pantalons obligatoires, alors que les gars peuvent exhiber leurs muscles…
Chère condition feminine, que je suis actuellement en train de questioner dans sa dimension indonésienne... les résultats de mon enquête sont pour bientôt !


Premiers contacts avec la "jungle" (très domestiquée !)

Sous la cascade !

mardi 11 octobre 2011

Prambanan, ou l'Inde en Indonésie


Quelques jours avant la fin du mois de septembre, j'ai eu envie de profiter d'une après-midi de libre pour aller à Prambanan, l'un des trésors de Jogja. C'est un lieu incontournable pour les touristes et amateurs de belles pierres (et il y'en a !), il fallait donc le visiter. Bien-sûr, en arrivant, j'ai été quelque peu déconcertée par l'immense parking surmonté d'un grand panneau en anglais indiquant l'entrée pour les « non-locaux », comme si seuls les étrangers s'intéressaient aux monuments javanais. Même le chemin à suivre pour les toilettes était en anglais, ce qui fait que j'ai vu des Indonésiennes respectables se tromper de porte, et sûrement se retrouver nez-à-nez avec leur mari, ce qui dans la tradition javanaise est un comble de malséance !
Heureusement, malgré les apparences d'attrape-touristes, il n'y avait pas trop de bus garés, seulement un car de Japonais armés de leurs appareils-photos, et, bien-sûr, le bus des Français (retraités pour la plupart). Nous sommes à vrai dire plutôt nombreux à Yogya, et je connais pas mal d'Indonésiens qui apprennent notre langue au Centre Culturel Français, un endroit très sympa même si il est rempli d'expat'.
Après avoir payé un tarif étudiant qui n'en est pas un- supérieur au prix du ticket pour les indonésiens, espérons que ce surplus ira à la reconstruction des temples !-, on pénètre dans l'enceinte du sanctuaire hindouiste. Les temples sont là, dressés au milieu des goyaviers depuis déjà quelques années...
Ils datent en effet du IXe siècle, époque où l'hindouisme remplaça le bouddhisme à Java. Si à l'origine, il y avait selon la légende plus de mille temples, il n'en reste que 240 (surtout des templions !).
A la suite d'un tremblement de terre à Jogja en 2006, le site a été gravement endommagé, et plusieurs temples ont vu leur accès fermé au public. Le sanctuaire est maintenant en cours de réhabilitation sous l'égide de l'Unesco, mais le temple principal, dédié à Shiva, reste inaccessible. On peut se promener sur les temples voisins de Brahma et Vishnou, et pénétrer dans les tours qui abritaient les montures respectives des trois divinités, dont seul le taureau de Shiva reste visible.
Les murs sculptés racontent des histoires : de fratries de singes magiques, de monstres ou d'êtres ailés merveilleux, même des scènes du Kamasutra, et bien-sûr l'épopée du Ramayana.


Sur la route de Prambanan, le Candi Kalasan, majestueux
The "Tree of Life", au milieu des temples !

Les silhouettes des temples, tout en dentelle




Car c'était aussi là l'une des raisons de ma venue à Prambanan : voir le ballet du Ramayana, une légende importée d'Inde mais réappropriée par la culture javanaise.


C'est en plein air, la nuit, avec les temples éclairés pour arrière-scène, que se déroule le spectacle. Et quel spectacle ! : orchestre de gamelan, narratrice, et tout une troupe de danseurs avec à sa tête les héros de l'histoire, Râma, sa promise Sitâ, et son ennemi Râvana.


L'intrigue, à rebondissements, est trop longue pour que je puisse la détailler ici, elle était expliquée dans un français hasardeux à Prambanan, très drôle ! Sachez qu'il s'agit de luttes entre le bien et le mal, la fidélité et le mensonge, sans que l'on sache très bien qui est totalement ombre ou lumière. La fin, bien-sûr, est heureuse : Râma, qui était parti à la recherche de Sitâ, enlevée par Râvana, parvient à la retrouver, et après lui avoir fait passer un test de pureté (qui consiste à s'immoler sur un bucher pour savoir si elle n'a pas péché, sympa !), consent à se marier avec elle.



C'était une représentation magique, un mélange de théâtre, musique et danse empli de religiosité qui m'a énormément plu, malgré le fait que le public soit constitué presque uniquement de touristes, plus ou moins attentifs au spectacle. Les danses, notamment, sont totalement différentes de la danse de ballet classique que l'on connaît en France, beaucoup plus lentes, très gracieuses, sauf quand elles évoquent des combats !





Prochaine étape de mon parcours mystique à Java, chercher Buddha du côté de Borobodur, autre sanctuaire à proximité de Jogja !


 

Râma le magnifique ! (ou peut-être son frère...)
Un orchestre de gamelan, aux sons doux et étranges !



Râvana qui profite de l'absence de Râma pour essayer de conquérir Sitâ

Danseuses du "corps de ballet"